Lors de notre séjour à Yangon, nous avons pris le train circulaire. Celui-ci dessert environ 40 gares en 3 heures. Il ne s’agit pas de le prendre pour une destination précise mais simplement de découvrir les environs de Yangon par un moyen simple, pas cher du tout et surtout voyager dans le temps. Ce train est exclusivement utilisé par les locaux pour se rendre au travail ou aller aux différents marchés des lieux traversés. Cela est particulièrement vrai pour le marché de Da NyinGone situé à mi-parcours du trajet, environ 1H30 de Yangon. Embarquons ensemble pour un voyage inoubliable parmi la population autochtone souriante et attachante malgré les conditions sommaires de ce mode de déplacement.
Prendre le train à la gare principale de Yangon
La démarche est relativement facile. Il faut se rendre à la gare de Yangon et demander la plateforme 7. Le ticket se prend sur le quai de cette plateforme avant de monter dans le train. Il y a des départs environ toutes les heures très tôt le matin (6h-17h) et tous les jours pour un montant de 300 Ks (0,2 €!).

En gare de Yangon. Vous ne comprenez rien? Nous, non plus! Soyons honnête, l’affichage en anglais arrive juste après
A bord du train…
Nous partons à bord d’un train voué à disparaître. En effet, des projets sont en cours afin d’améliorer la sécurité et la rapidité du transport. Il est ainsi fort probable qu’une nouvelle ligne et des trains récents remplaceront ceux-ci. On peut évidemment s’en réjouir pour le confort des locaux. Cependant, compte tenu de ce que l’on sait des moyens financiers de cette population, pourront-ils continuer à emprunter ce transport dont le tarif ne pourra qu’augmenter?

A l’avant du train, le conducteur du train. L’accès est libre, la porte avant est ouverte, vue sur la voie…
Dans le train, la vie s’organise, des vendeurs ambulants exercent leur activité, vente de fruits, d’aliments frits… Dans d’autres wagons, le train sert aussi au transport de marchandises pour le marché, légumes et fruits produits dans la région.
Tout doit rentrer! On se pousse, on fait de la place et on se serre, tout cela dans une ambiance bon enfant. On parle fort pour se faire entendre malgré le bruit des wagons. Les portes sont ouvertes, des gens s’assoient sur le rebord de l’encadrement.
Arrêt au marché de Da NyinGone à mi-parcours
Après 1h30 de trajet, nous descendons du train pour parcourir le marché. Nous pourrons prendre le train suivant, nous avons environ 1h devant nous…
Décrire ce moment est à la fois passionnant et exigeant. Toutes sortes d’émotions traversent le corps, de l’appréhension à l’émerveillement en passant par le dégoût, tout y passe! On débarque dans un monde qui n’est pas le nôtre. Chacun tient une place précise, on vient ici pour acheter ou pour vendre rien d’autre! On ne s’y promène pas, sauf nous! On se sent voyeur comme toujours. Pour nous, c’est un spectacle vivant. Il faut s’arrêter et regarder. Mais comment rester inactif dans un environnement qui bouge, qui grouille de vie, d’animation. Ça crie, ça s’interpelle, il y en a même qui chante!
Un marché sur les rails
Le marché s’étale sur la voie ferrée. A chaque passage d’un train, il faut déménager, puis se réinstaller juste après. Étonnant ballet des vendeurs et clients qui traversent la voie…
Un marché couvert
Proche de la voie ferrée, le marché s’étend sous un hangar. En bon touriste occidental, habituellement, la visite d’un marché est source de ravissement par les couleurs, les odeurs, l’envie de goûter les aliments… Nos repères sont ceux du marché de nos campagnes françaises ou européennes…
Il n’y aura pas d’autre avertissement, veuillez sortir de vos clichés et accepter la différence!
La nuit précédente, il a beaucoup plu et le sol est détrempé. Recouvert de bric et de broc, tôles et bâches pour l’essentiel, il fait sombre. Nous marchons dans des allées glissantes, il n’y a pas de revêtement mais ce n’est pas non plus la terre. Le sol est noir et nos pieds progressent dans la fange, mélange de terre, boue, déchets divers. Des fossés ont été créés afin d’évacuer l’eau et l’on passe au dessus à l’aide de sacs de sable déposés ici depuis longtemps parfois éclatés par les nombreux passages rendant le support incertain. On craint de glisser et de se retrouver les pieds dans l’eau croupissante. Une angoisse s’empare de chacun de nous. Il y a sans doute des rats! On s’interroge. Comment fait-on pour commercer dans ces conditions? Passe encore pour les légumes qui paraissent frais mais qu’en est-il du poisson, de la viande? Il fallait venir en bottes! Pourtant les locaux sont également en tongs et ne semblent pas perturbés par l’état des chemins.
Parcours difficile, il faut sortir de nos références, ne plus penser et accepter ce que l’on voit tel que cela se présente!
Nous poursuivons dans les allées et arrivons à un croisement. Surprise! Cette fois-ci plus de chemin! Il est transformé en ruisseau. Environ 10 cm d’eau recouvre l’ensemble du marché. Tout le monde patauge! Désolé, pas de photo ni vidéo, on n’a pas pu! On avoue, sans doute trop déprimé par cette vision, on rebrousse chemin comme des voleurs! On trouvait déjà que les birmans étaient très forts pour échanger des marchandises dans les conditions précédentes mais là on ne pouvait même pas l’imaginer. Nous pensons qu’en France, pour un cas comme celui-ci, l’état de catastrophe naturelle serait déclaré! Et là, il semble que la vie continue. « Il semble » simplement car nous supposons que les gens n’ont surtout pas le choix. Il faut travailler et vendre coûte que coûte pour manger!
Nous repartons vers la gare afin de retrouver nos esprits et un peu de sérénité. Nous rencontrons un photographe reporter en free-lance qui travaille pour National Geographic. Nous engageons une brève discussion et échangeons sur nos impressions. C’est un habitué, il est déjà venu plusieurs fois au Myanmar et dans des conditions bien pires (oui, on sait que c’est possible mais tout de même). « La Birmanie, c’est comme l’Inde, on en tombe amoureux ou on la déteste! » nous dit-il. Nous avons entendu cette phrase par ailleurs. Mais juste une question. A t-on le droit de ressentir les deux? Car pour nous, à cet instant, c’est le cas! On se sent un peu c.. car notre baroudeur vit cela avec beaucoup de recul. On a encore beaucoup à apprendre, la leçon n’est pas finie…
Il est temps de reprendre le train!
Sur le trajet, découverte de Yangon outside

Sur le parcours, lors du croisement d’un autre train, rencontre furtive juste le temps d’un regard. Qui sommes-nous pour cette jeune fille?
Dans les environs de Yangon et sur les bas-cotés de la voie ferrée, des habitations de fortune se dressent comme elles peuvent. Nous constatons que ce train constitue certainement le lien qui permet les échanges. On vit vraiment à partir et autour de ce moyen de transport facile et pas cher.
Fin du voyage, arrivée en gare centrale, quai 7
Et en vidéo, « Prendre le train circulaire à Yangon », ça donne quoi?
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